PORTRAIT

Blandine Waldmann,
dans l’exploration du chant intérieur

Marquée par la très cosmopolite Bruxelles où elle fait ses apprentissages, Blandine Waldmann est instinctivement sensible à un répertoire dense et puissant où le piano s’imagine orchestre. Si la pianiste française va puiser en profondeur dans cette dimension harmonique riche et complexe, c’est pour mieux dégager ce chant intérieur qui rejoint volontiers ceux de Scriabine, qu’elle vient d’enregistrer avec Brahms et Moussorgski, de Liszt, Beethoven, Franck, Debussy ou Ravel.

Jeune, Blandine Waldmann pratique le violon et le piano, mais son cœur balance vite pour le second : avec lui, elle découvre un monde à la mesure de sa soif d’exploration des chemins entrecroisés de la polyphonie, des formidables champs ouverts entre les notes. Comme une immense symphonie – un répertoire qui la touche depuis toujours. Le violon influencera son approche lyrique du phrasé, ce legato qu’elle travaille beaucoup auprès d’Alexandre Mazdar au Conservatoire royal néerlandophone de Bruxelles – véritable plateforme d’échanges avec des musiciens de toutes nationalités.

UNE FORMATION OUVERTE SUR LE MONDE

« Il a été un professeur essentiel pour moi, une sorte de révélateur, confie la pianiste, en ce qu’il m’a conduite vers la recherche et la maturation du chant intérieur, c’est-à-dire l’anticipation de la phrase musicale dans la projection mentale du son. »

Toujours en quête, elle tend vers cet équilibre exigeant entre ce qu’elle est et ressent intimement, et l’expression très précise des émotions inscrites aux cœur des œuvres, dans le respect du texte.

Cet apprentissage fondamental, hors de France, vient compléter celui de Dominique Cornil, avec qui Blandine Waldmann consolide sa technique et structure son travail au Conservatoire royal francophone de Bruxelles. Elle perfectionne également son jeu orchestral auprès de Daniel Blumenthal et obtient un master de musique de chambre.

 

La jeune pianiste se nourrit également de différents points de vue en master-classes, en Italie notamment, ainsi que de personnalités musicales qu’elle admire : Maria Callas ou Menahem Pressler, « qui savent rendre leur âme quasi palpable », Martha Argerich, pour la fluidité et la conduite de la phrase, Wilhelm Kempff, pour la grande profondeur de ses interprétations, Boris Berezovsky, pour l’élan incroyable qu’il sait insuffler.

LISZT ET SCRIABINE : DES COMPOSITEURS EN RÉSONANCE

Résultat : Blandine Waldmann affiche une liste impressionnante de victoires en concours international, dont les plus récentes sont ses premiers prix au IMKA (2018), au e-Muse International Competition d’Athènes (2017), aux concours Florestano Rossomandi (2016) et Erik Satie (2015)…

Mais plus que le palmarès, ce sont les œuvres qui montrent son cheminement.

« Je pense que les œuvres nous appellent et prennent sens à un certain moment de notre vie », livre la pianiste.

Si elle est très touchée par Brahms, Liszt et sa Sonate, la musique française, dans laquelle elle baigne depuis son enfance, Bach, vers qui elle revient toujours, c’est Scriabine qui entre puissamment en résonance avec ce qu’elle est aujourd’hui.

« Il rassemble maintes qualités que je recherche au piano : l’harmonie hyper sophistiquée aux couleurs raffinées, la superposition de mélodies créant de multiples plans sonores, la diversité des états émotionnels parfois opposés ; mais ce qui me touche plus que tout est la singularité de son imaginaire. »

UN DISQUE VIRTUOSE ET INTÉRIEUR

Après un premier disque tourné vers la musique contemporaine, un second paraît cet automne sous le label Dux, rapprochant la neuvième sonate du compositeur russe de trois œuvres à la fois virtuoses et intérieures de Brahms – les Variations sur un thème de Paganini II, l’opus 117 et le Capriccio de l’opus 116 – et des Tableaux d ’une exposition de Moussorgski, dans la version originale du compositeur « aux sonorités parfois archaïques et crues ». Parmi ses projets figure également l’envie d’approfondir le répertoire de musique de chambre, notamment en quintette, et d’enregistrer Liszt et à nouveau Scriabine.